Tobias & The Angel, Compass Box, 47,6%
https://www.whiskybase.com/whiskies/whi ... e-angel-cb
Supposément donc un assemblage de Clynelish 1994 et de Caol Ila 1984.
J'ai essayé de ne pas me mettre d'entrée de jeu dans une mentalité de "tireur d'ambulance" puisque je sais que cet embouteillage a créé pas mal de déception chez plusieurs dégustateurs avertis.
Le nez est timide, simple en apparence et peu spontané, mais en le forçant un peu à causer on peut en tirer des belles choses. A la base c'est très frais sur un profil Caol Ila simple avec un peu moins de tourbe qu'à l'accoutumée, sur des thèmes comme la pomme verte fraiche, les herbes aromatiques et la saumure. L'aération et pas mal de bonne volonté peuvent faire entrevoir quelques vraies belles notes de vieux Caol (vieux bouquins, bulots) à partir d'un moment, mais elles sont transitoires, et le tout, bien qu'élégant donc, manque de spontanéité et d'évolutivité.
Le problème c'est qu'une fois arrivé en bouche, effectivement, il n'y a plus une once de magie. Alors certes l'alcool est à un niveau bien choisi et la texture moyenne marche bien, mais niveau gout ... que dire ? On est sur un Caol Ila 12, ou encore non, c'est pas assez intense, plutôt sur un Moch. Alors entendons-nous bien hein, J'ADORE Caol Ila 12 et Moch aussi (quoiqu'un peu moins), ... mais c'est pas ce que j'attends quand je déguste un truc fait pour bonne part d'un ainé de trois fois leur âge, et supposément d'un Clynelish qui semble ici être aux abonnés absents. C'est vraiment un profil de jeune Caol Ila simplissime. Sable, cendre, végétaux saumurés. Rideau. Pas d'évolution, pas de second niveau de lecture, pas d'autre impression à la deuxième gorgée. La finale, moyenne en longueur, est sur une même trame aromatique.
Bref, après un nez qui, bien que timide, possède de vrais moments d'élégance, on arrive sur une bouche et une finale dont le manque de complexité et de valeur ajoutée par rapport à de jeunes Caol Ila OB (qui coutent même pas le dixième du prix) est consternant. Dans la mesure où le Clynelish ne m'apparait qu'au nez, et encore, "par soustraction" (puisque je lui prête plutôt un effet de "détourbage" du profil Caol qu'un véritable champ aromatique à lui), je considère qu'on a ici affaire à un assemblage dont NON SEULEMENT les parties sont médiocres, mais en plus dont la somme de celles-ci est sans doute moindre que chacune prise séparément.
Puisque ce n'est un secret pour personne que j'aime Caol Ila, cependant, je ne peux pas cacher le fait que j'ai aimé boire ça "dans l'absolu", donc ma subjectivité gustative me force à lui donner
87-88. Mais ça reste une grosse déception. Pour vous mettre en perspective, je donne 88 au Caol 12 OB
Et je pense sérieusement que le Caol Ila 12 apporte globalement une expérience qualitative du même niveau (sans doute moins bien au nez, mais meilleure sur le reste, et sur des marqueurs tout à fait comparables), à littéralement 5-10% du prix. En revanche, pour quelque chose qui exécute le profil Caol Ila - Clynelish mais en mieux fait, plus intense, plus complexe, et juste meilleur à tous les étages, ruez-vous sur le Flaming Heart 5th edition ... lui à 25% du prix.
Ce fiasco évoque également la question de la vision qu'a Compass Box actuellement et pour le futur. Cela fait un moment que je ne m'intéresse plus à leurs embouteillages autant que j'ai pu le faire par le passé, la plupart étant devenus peu inspirants je trouve, et souffrant sans doute d'un manque de renouvellement dans les concepts, avec une impression que Glaser nous a déjà proposé tout ça mais en mieux, avec des composants qui font plus rêver et à prix moindre. L'annonce de Tobias & The Angel avait fait l'effet d'une petite bombe parmi les ex-adorateurs blasés puisque, de façon inattendue, Glaser semblait vouloir renouer avec l'exceptionnel, avec le grand frisson, à grands renforts de "c'est ce qu'on a embouteillé de meilleur". Après la dégustation ... que dire ? Soit ils y croient vraiment, et alors définitivement on n'a plus du tout la même définition de ce qu'est un bon whisky. Soit ils savent pertinemment que le jus n'est pas exceptionnel et que, PIRE (pour eux), il ne représente pas un bon travail de blender à mon sens, et alors là ça veut dire qu'ils ont entièrement vendu leur cul au dieu marketing (ce que ne renierait pas l'étiquette). Dans un cas comme dans l'autre la conclusion est tristounette, et le rapport qualité-prix est juste risible. M'enfin, "just my two cents" comme on dit